Et la santé ? Épisode N°2
Côté Anses…
C’est LE domaine le plus important, le moins étudié, le moins opposable et le plus controversé.
Mais en dehors des refus des uns et des autres à questionner nos moyens de communications modernes, hautement facilitateur du quotidien, où en sommes nous malgré le manque crucial de données et de recherches ?
L’Anses (Agence Nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) avait, en 2013, rendu un rapport recommandant de réduire l’exposition des enfants aux radiofréquences émises par les téléphones mobiles. En 2016 elle était allée beaucoup plus loin dans son rapport et ses recommandations :
- Elle avait conclu que l’exposition aux radiofréquences avait un effet possible sur le bien-être des enfants et leurs fonctions cognitives (mémoire, fonctions exécutives, attention), mais avait relativisé, exprimant que les effets observés pourraient être davantage liés à l’usage des téléphones mobiles qu’aux radiofréquences qu’ils émettent
- Elle avait également conclu que les enfants était aujourd’hui exposés à de multiples sources de radiofréquences et ce dès leur plus jeune âge voire in utero. Cela représente un danger à évaluer absolument, les enfants pouvant être bien plus exposés que les adultes en raison de leur petite taille, de leurs spécificités morphologiques et anatomiques et des caractéristiques de certains de leurs tissus
- Il lui paraissait nécessaire de revoir les niveaux de référence visant à limiter l’exposition environnementale aux champs électromagnétiques radiofréquences, « afin d’assurer des marges de sécurité suffisamment grandes pour protéger la santé et la sécurité de la population générale, et particulièrement celles des enfants »
- Nécessaire également de réévaluer la pertinence de l’indicateur servant à mesurer l’exposition des usagers, le DAS (débit d’absorption spécifique), en établissant des valeurs limites d’exposition afin de développer « un indicateur représentatif de l’exposition réelle, quelles que soient les conditions d’utilisation ».
- Le comité d’experts appelle par ailleurs à redoubler de vigilance. Olivier Merckel, chargé des nouvelles technologies à l’Anses et coordinateur du rapport insiste : « du fait de leur plus petite taille, de leurs spécificités anatomiques et morphologiques et des caractéristiques de certains de leurs tissus, ils sont davantage exposés. En particulier, les zones périphériques de leur cerveau sont plus exposées que celles des adultes aux radiofréquences. » Des études dosimétriques ont aussi mis en évidence une plus forte exposition de la moelle osseuse chez les enfants.
- Et de conclure sur une recommandation à l’usage des parents visant à « inciter leurs enfants à un usage raisonnable du téléphone mobile, en évitant les communications nocturnes et en limitant la fréquence et la durée des appels«
Avril 2021, l’Anses a sorti un rapport d’expertise « Expositions aux champs électromagnétiques liées au déploiement de la technologie de communication « 5G » et effets sanitaires éventuels associés ». Le contenu de ce rapport ? Rien de nouveau du tout. L’Anses reste très prudente et contradictoire en réitérant de manière répétée tout au long du rapport le besoin de recherche qui fait grand défaut aujourd’hui pour se prononcer de façon concrète sur les risques sanitaires éventuels. Toute personne prenant le temps de lire le rapport pourra constater l’ambivalence et parfois le non sens des conclusions.
Par ailleurs des rapports sont cités notamment le Rapport du Conseil de la santé des Pays bas 2020 «5G et Santé» qui semble être le plus fourni. Mais honnêtement sur un sujet d’une telle ampleur il est ahurissant de parcourir 240 pages de rapport avec si peu de données référentielles car trop peu d’études de recherches sont entreprises. Pour donner un exemple emblématique, au sujet des conclusions sur les études concernant les effets sur les cellules cutanées, l’Anses reconnait que la quasi totalité des données étudiées ne proviennent que d’une seule équipe de recherche… La presse nationale papier semble ne retenir qu’une seule information ; celle qu’il n’y a pas plus de risque avec la 5G. Au vu de la lecture de ce rapport, cette conclusion, sans plus d’informations données, est au mieux partielle au pire douteuse.
Quelques exemples des conclusions diverses que l’on peut lire dans le rapport :
« 6.2.5 Conclusion Les résultats des expertises précédentes conduites par l’Anses concernant les effets sanitaires de l’exposition aux radiofréquences sont pertinents pour la 5G dans la bande 700-2500MHz, bien qu’aucune étude ne concerne spécifiquement la fréquence de 700MHz. Par ailleurs, les niveaux d’exposition dans l’environnement seront vraisemblablement comparables entre la 5G et les précédentes technologies de téléphonie mobile pour les fréquences de 700 à 2500MHz. Il est nécessaire de souligner que tous les rapports publiés par d’autres organismes à l’étranger constatent le manque de données, leur dispersion et leur faible qualité. Ces rapports mentionnent également un possible biais de publication dans la production des données,car les résultats de certaines études, en particulier de celles qui montrent une absence d’effet, sont difficiles à publier. Bien que la bande 700MHz soit citée dans plusieurs rapports, les données scientifiques concernant spécifiquement cette bande sont pratiquement inexistantes.«
« 6.3 Effets éventuels liés à l’exposition aux champs radiofréquences dans la bande 3,5GHz 6.3.1 Analyse des publications issues de la recherche bibliographique Très peu d’études ont été publiées sur les effets physiologiques ou biologiques d’un signal de fréquence 3,5GHz, que ce soit chez l’Homme, in vivo chez l’animal ou encore in vitro. (…) En conclusion, les 5 études répertoriées dans la bande de fréquences autour de 3,5GHz ont chacune exploré un domaine de recherche spécifique (…) Ainsi, dans cette gamme de fréquences, les données sont insuffisantes pour conclure à l’existence ou non d’un effet biologique, physiologique voire pathologique qui pourrait avoir un impact sur la santé humaine »
« 6.3.3 Conclusion La littérature scientifique ne fournit pas suffisamment d’études dans des fréquences proches de 3,5GHz (seulement 5 études et dans des domaines très disparates) pour pouvoir procéder à une évaluation du niveau de preuve d’effets sanitaires éventuels. Le groupe de travail a tenté de répondre à la question de savoir si dans la gamme des fréquences les plus étudiées, entre 840MHz et 2,85GHz environ (c’est-à-dire proche de 3,5GHz, mais aussi de 700MHz), il existait un lien entre la fréquence et l’intensité des effets biologiques étudiés. (…) L’analyse suggère que les études ciblant des effets cellulaires et moléculaires tendent souvent à montrer que les effets biologiques augmentent avec la fréquence. Ces résultats ne sont pas confirmés pour les effets comportementaux et neurophysiologiques chez l’animal ou chez l’Homme. (…) Ainsi, la 1ère conclusion est qu’il ne paraît pas possible, à l’heure actuelle, d’extrapoler des résultats d’études scientifiques à des fréquences différentes, même proches, pour en tirer des conclusions sur les effets biologiques, physiologiques et a fortiori sanitaires éventuels dans la bande 3,5GHz voire 700MHz, très peu étudiée également. Au final, il n’est pas attendu d’effets biologiques, physiologiques ou sanitaire des signaux à 700MHz ou 3,5GHz qui différeraient grandement de ceux observés précédemment à des fréquences proches. »
Euh… Ce n’est pas monstrueusement contradictoire ça ?…
Sources et compléments d’info :
- Notre article Et la santé ? n°1
- Avis de l’Anses, rapport d’expertise collective, juin 2016
- Article du Monde faisant écho à l’avis de l’Anses
- Le rapport de mars 2021 de l’Anses
- Un article du GreenIt reprenant le dernier rapport de l’Anses : « 5G : l’Anses demande de nouvelles études«